And Also the Trees Brest salle le Vauban 07 Avril 2024 « Habité ».
C’est le moins qu’on puisse dire ! c’est la sensation « intérieure » que j’ai ressenti en franchissant les portes de l’Hôtel Vauban à Brest ce Dimanche 07 Avril. Un voyage dans le temps, puisqu’il y a 36 ans, une éternité, je franchissais les mêmes portes pour un rendez vous avec le même groupe : And Also the Trees.
De l’époque, il me reste une trainée de poudre chimique dans le cerveau, non pas illicite , mais simplement historique : une fulgurance de mémoire. Une salle sombre et des jeunes hommes très élégants sur scène, entourés d’autres jeunes hommes moins élégants, arborant pour certains des branches d’arbres attachées au blouson, en référence au nom du groupe « Et aussi les arbres ».
A l’époque, l’imagination prenait le dessus sur la réalité. Nous étions créatifs et à défaut de magasine ou d’internet, nous visualisions nos héros musicaux sur la simple jaquette d’une cassette ou sur la pochette intérieure d’un vinyle. Et encore ! il fallait pour cela être passé par la case disquaire et ne pas se contenter d’un bon » RECandPLAY » sur une cassette TDK « live pirate » revendue sous l’impair. Comme beaucoup je me suis imaginé une vie de romantique, désespéré et fragile, moins poète maudit (vu mes notes de baccalauréat) que musicien transi ( triangle et gazou), recherchant à l’époque des alliés à la mélancolie . L’ambiance musicale mêlée à une élégance vestimentaire, rarement retrouvée depuis, m’a conduit à adorer la musique d’And Also the Trees.
Simon et Justin Jones les deux frères, leaders du groupe, arboraient redingote, gilet, chemise à col jabot. Le cheveu gominé coiffé en arrière, un foulard autour du cou les dandy anglais faisaient vibrer les cordes de leurs guitares telle une mandoline et Simon, l’aîné, d’une voix grave et ténébreuse, emplissait l’atmosphère d’une présence onirique.
Ce Dimanche 07 Avril 2024 , c’est donc à 18 h tapante sur ma montre à gousset (private joke), que tel des revenants, réapparaissent Simon et Justin Jones, dans une fumée échappée d’une scène du film de Tim Burton « Sleepy Hollow, la légende du cavalier sans tête ». Mais justement, ou avais je la tête , MOI, pour avoir oublié ce groupe attaché à ma jeunesse ? J’avais échappé au « Virus Meadow » de 1986 , je m’étais réfugié dans les sirènes bruyantes des 90’s puis je m’étais fait happer par les guitares saturées du shoegaze de la décennie suivante. Episodiquement je recroisais le son si singulier des anglais d’Inkberrow, contré de Worcestershire, mais ma mémoire saturée associait plus le souvenir de la sauce aigre douce éponyme que les jolies ballades entendues à l’époque.
Triste vieillesse. Mais il ne faut jamais désespérer, il n’y a pas que les « emm—es » qui reviennent au gallot, et au printemps 2024 c’est avec leur 14ème Album, le bien nommé Mother-of-Pearl Moon que les And Also the Trees nous reviennent, fringants cavaliers toujours aussi bien habillés pour cette mini tournée française de 5 dates.
Brest, la citadelle la plus à l’Ouest, a su attirer en sa salle Vauban 300 nostalgiques et quelques nouveaux curieux. And Also the Trees en nous jouant 20 titres, dont la quasi intégralité de leur dernier album, va régaler pendant près de 2 h son public. On sillonne posément cette campagne anglaise reposante, clairsemée de percussion légère (batterie-basse) et d’une clarinette virevoltante et fragile. On reste capté par les gestes lents de Simon et sa chorégraphie suspendue entre ciel et terre.
Le souvenir de 1988 est présent, chez moi comme chez Simon Hugh Jones. Il se rappelle très bien nos chemins croisés, ou du moins ses 28 ans dans cette même salle Vauban. Malgré ce temps passé, l’énergie reste présente, quand au dénouement d’une set-list, le son s’étire et se muscle. Un vent de jeunesse souffle et me rappelle le 7eme ciel entendu sur « Scarlet Arch » complainte torturée aux paroles mystérieuses. L’album « Virus meadow » porté à bout de bras, par un fan inconditionnel est aussi à l’honneur avec les titres « Virus Meadow, Shantell » et pour conclure avec l’explosion de son sur « Slow pulse boy » .
La dernière note de musique des And Also the Trees est suivie d’une ovation du public , qui célèbre là, la classe d’un groupe fondé en 1979 et qui a su, sur près de 4 décennies, entretenir un art majeur alliant écriture et musique.
Un chanteur habité, classique et classieux, un guitariste virtuose et des musiciens performants, telle est le secret d’une éternelle jeunesse.
Photos Fabrice Droual
Organisateur de la soirée Association @Arsenalprod