It It Anita, Youf , Marcel Salle Antipode Rennes le 23 Février 2024.

A l’approche de la salle Antipode ce vendredi soir, une préoccupation me gagne. Une affiche “Noise Rock” from Belgium, est-ce le gage de passer une belle soirée en compagnie de 3 nouveaux amis : Marcel, Youff et Anita? Ou au contraire, est-ce la fin prématurée de mon couple d’oreilles exposées à une tempête de sons. Le pot belge servi ce soir va-t’il se transformer en mauvaise blague, avec dans les rôles principaux : Marcel dit “Larsen”, “yOuf c’est fini” et “Anita c’est mo(u)che” !

Inquiétude “organique” pour mes esgourdes, habituées à de chastes écoutes de pop anglaise mélodieuse. mon niveau de décibels sature généralement à la cote Idles, avec tout de même quelques essais Punk Hardcore du côté de Binic, en particulier avec les amis de Meat Shirt. “Douillet je suis, douillet je le resterai”, comme aurait pu le chanter Stromae.

L’inquiétude de mes précieuses oreilles était d’autant plus légitime qu’elles venaient d’apprendre que la journée du samedi, où elles avaient prévu une thérapie auditive avec le groupe Irlandais Lankun, était reportée. La France est séparée de l’Irlande par la mer celtique. La colère de cette dernière n’a pas permis le voyage de ladite musique celtique, en ferry, vers les Antipodes de Rennes.

L’accréditation en poche est toujours pratique lorsque la soirée affiche complet comme ce soir. Passé la sécurité, je me dirige vers la partie mousse (aillon) où oeuvre déjà DJ Sans Transition.

Joli nom pour celle qui, aux platines et en vinyles, a pour mission de faire patienter les premiers arrivés et généralement en fin de soirée de faire sortir les abonnés “abSons”.

J’y retrouve avec plaisir les webzineurs et photographes qui couvrent cette soirée.

En hommage probablement aux couleurs du drapeau belge, l’ingénieur lumière ce soir nappe la scène du club d’une lumière rouge, promesse de diablerie sonique. Le jaune sera peut présent, au désespoir des ISO de mon appareil photos. A noter que le noir fera une brève apparition en fin de soirée, peu après minuit.

20H 30. On démarre avec Marcel, qui présente son style comme “noisy pot-pourri from belgiuuuum” à base de sérénades indie/post-punk pour toute la famille.

La légende “Bandcamp” dit que Marcel est un fantôme de carnaval qui aime faire beaucoup de bruit en frottant tendrement ses joues contre les humains. Ce soir, le quintet énervé oscille entre post-punk et garage rock rappelant parfois les sonorités de Sonic Youth et rendant hommage (déjà) à It It Anita. Son leader débute le set en pull col cheminée et le finira en tee-shirt à l’effigie du pape François saluant une foule d’adorateurs. Beau résumé de ce premier concert où Marcel, en toute modestie mais avec talent, déroule une bande-son Samba Rock où cohabitent intelligemment la basse audacieuse, la guitare énervée, les sifflets brésiliens, des maracas et un kazoo. Une bonne dose de pitreries à la sauce “anglo-wallonne”, accompagnées d’un son fort et cohérent, qu’on peut retrouver sur leur premier album “Charivari”.

Pour l’instant, on est loin du tapage annoncé et la blague belge n’est pas du tout mauvaise. Voyons comment va prendre la mayonnaise avec le second groupe proposé ce soir : YOUF.

D’abord, une petite pause et la confirmation du talent de DJ Sans Transition. Avec sa collection de vinyles post-punk-noise au format 33, elle réussit à ambiancer le club. On m’avait annoncé une sélection « Women, let’s make noise ! », c’est avec les Fontaines DC qu’elle me berce. L’expression souriante de son visage témoigne du plaisir qu’elle éprouve et que je partage.

Youff est un groupe belge de noise rock. Il faut croire que dans cette catégorie, il y a aussi différents niveaux et que le level peut être monté. Thème de la soirée : une musique brute et dérangeante. Je crois observer une folle course où le leader “of men” aux stigmates et attitudes Curtisiennes déroule une transe hypnotique voire épileptique durant 40 minutes. On est dans le Noise noir avec une basse très puissante et un chant étouffé, mi slamé mi craché. Les couleurs rouges du début à la fin du set confirment l’impression que le type est possédé et que le Pape François ferait bien de sortir du tee-shirt de Marcel pour exorciser ce démon.

Bof ! Je suis loin d’être emballé. Toute ressemblance avec des personnages ayant existé n’est que coincidence (paix au Génie, RIP Ian).

C’est mon avis, et il ne semble pas partagé par un public de connaisseurs qui apprécient l’oeuvre des 5 musiciens jouant ce soir “Heydays”, leur septième album disponible depuis octobre 2023. Ecoutez le titre “Sunshine”, il se peut que le soleil cache en réalité les flammes de l’enfer.

“Chaude et dérangeante”, l’huile est à température et la tête d’affiche It It Anita s’apprête à faire encore grimper le thermostat de plusieurs degrés. Cette fois la salle est pleine et la jauge atteinte. Pas la peine d’espérer positionner quelques haricots verts entre deux frites. La foule est dense et le cornet principalement composé de pogoteurs du vendredi tout de noir vétus.

Des punks “sans chiens” agitent la fosse et cotoient des nostalgiques de WIRE ou des PISTOLS. Pas de videurs au club ce soir? Pas besoin, l’ambiance bon enfant finira par l’emporter, malgré quelques vagues assassines et plusieurs débordements de gobelets de bières.

Malin que je suis, je m’étais réfugié à gauche de la scène, protégé par un nouvel ami au physique de déménageur. Cela m’a permis d’observer la communion d’un jeune public enthousiaste et vivant la musique de l’intérieur. Leur corps, probablement possédé, bascule par intermitance sur scène, pour un tête à tête avec Michaël Goffard, le guitariste et leader du groupe.

La réputation live du trio n’est pas usurpée.

Derrière sa batterie, Bryan Hayart, le sportif (vu qu’il était en short) des It It Anita, décharge une énergie tout en muscles (saillants) et conduit le duo de guitaristes à délivrer un son à toute bringue. Une tornade qui fait “Mouche” et me conduit à réviser définitivement la chute de ma blague belge. La voix de Michaël alterne avec celle d’Elliot Stassen (le bassiste et non le dragon !) qui rugit de plaisir plus que de hargne.

Les titres du nouvel album s’enchainent. J’apprécie particulièrement le morceau “Don’t bend (my Frend)” qui m’encourage à ne pas plier sous le scepticisme envers cette musique Noise.

Le trio, avec ce quatrième album, laisse derrière lui un homme (Damien Aresta), mais gagne par la même occasion une écriture couplet-refrain au phrasé à la Beastie Boys.

It It Anita est toujours prêt à faire du bon bruit, après dix ans d’activité, probablement dopé par les très bonnes critiques de l’album “Mouche”.

La caravane passe et le chien golden hurle pour notre plaisir ce soir (cf cover de l’album).

Qui l’eut cru ! La mayonnaise a pris .

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