La Route du Rock Hiver n°19-Samedi 1er Mars 2025 : « Acide et Doux »

couverture pour Sound Of Violence Live-report rédigé par Fabrice DROUAL  le 3 mars 2025

Nous y voilà, le 3ème jour du reste de la vie musicale hivernale en terre Sainte Bretonne. Vous trouvez que j’en fais un peu trop ? N’oubliez pas que j’ai fini sur les rotules hier avec le groove imparable de Getdown Services et que ce jour accueille la tête d’affiche du festival, les furieux Fat White Family.

Alors, autant ménager sa monture et attaquer par un peu de légèreté et d’indie pop à la Française, parfois Twee (doux), parfois noisy (acide) comme des bonbons Very Bad Kids. Ecouter Alva Starr est une expérience musicale douce et immersive, entre indie pop et mélodies éthérées. Leur musique, portée par des voix subtiles et des arrangements délicats, crée une atmosphère à la fois paisible et profonde. Sous cette apparente légèreté, les morceaux explorent des thèmes introspectifs et parfois sombres, avec une force tranquille. Sur scène, le groupe privilégie l’émotion à la parole, établissant une connexion intime avec le public. Chaque concert devient une parenthèse hors du temps, un voyage où l’on se perd un instant pour mieux se retrouver comme de grands enfants.

C’est ensuite avec le groupe Sinaïve qu’on commence à sentir le goût noisy (acide) du bonbon et qu’on augmente le son. Sinaïve, c’est un trio qui débarque sans prévenir (de Strasbourg) et redéfinit les contours du rock français. Entre psychédélisme brûlant, éclats noise et textes acérés, ils balancent une musique brute, poétique et sans compromis. Calvin Keller, chef de la bande, distille dans la langue de Molière ses inspirations à la croisée des chemins entre le post-punk entretenu par Séverin Hutt à la basse et un shoegaze ponctué par le groove hypnotique d’Alicia Lovich, à la batterie. La musique de Sinaïve fusionne habilement des influences allant des années 60 aux années 2000, tout en restant résolument ancrée dans le présent, avec une modernité captivante. Une pop moderne, entre mélodies fines et murs de son déchaînés. Ça cogne, ça envoûte, ça forge le respect et cela mérite urgemment un tourneur. Calvin Keller from Strasbourg nous l’a bien fait comprendre.

On poursuit avec Bryan’s Magic Tears, le groupe français qui fusionne avec brio shoegaze, noise-pop et rock lo-fi pour créer une musique à la fois brumeuse et électrique. Leur son oscille entre les guitares saturées de My Bloody Valentine, l’énergie désabusée de Sonic Youth et la mélancolie psychédélique de Spacemen 3. L’influence des Happy Mondays, sans Bez malheureusement, et la coupe de cheveux d’un frère Gallagher nous replonge en 1990. Avec des compositions à la fois rêveuses et abrasives, Bryan’s Magic Tears capturent cette sensation de flottement entre l’euphorie et le vague à l’âme. Un mélange de désinvolture et d’émotion brute idéal pour les âmes perdues. De Paname à Manchester, sans le côté Mad, on commence déjà à tourner dans cette salle à la recherche de la folie providence surnommée Lias Saoudi.

D’autres, entre temps, ont trouvé leurs amies bières et c’est un public surchauffé qui éructe déjà des « A poil ! » impolis. J »essaye de faire barrière de mon corps entre la scène et un mur de zombies frotteurs-pogoteurs. Je suis trop petit et même avec le renfort de mes collègues photographes, la masse « érudite », celle qui aime tout et qui braille dans tes oreilles, prend rapidement le dessus. Il faut dire que l’intro du concert de Fat White Family est surprenante : une bande son détonante du côté de chez Lias, loin de la délicatesse d’un Marcel, plus exactement un mix de pets, de caisses, de fusées et de flatulences façon FLAT-WHITE. Pendant ce temps un type portant un couvre-chef turc appelé Le fez ,comme fait exprès !, passe à côté de moi en portant un empoté ficus à pleines mains. L’indiscipliné Lias, en garçon Gamm vert, entre en scène. L’électron libre a encore frappé.
Une ouverture, une nouvelle fois surréaliste, sans slip de peau, mais en pot de terre sur un air emprunté à Robbie Williams et son Angels. Pot de terre contre pot de fer, c’est qui le plus grand groupe de la planète ? Fat White Family et ses démons. Nous voilà déjà en train de succomber sur Tinfoil Deathstar, déchu de la monogamie avec Polygamy Is Only For The Chief. Je profite d’une petite pause de synthé pour échapper au vilain frotteur-pogoteur qui me maltraite depuis dix minutes. Without Consent sublime cette réalité, moi je ne suis pas là pour me faire lacérer par un boulet.

Le set avance et le moment le plus subversif pour l’instant reste la maltraitance d’un ficus déplacé au gré des humeurs de Lias. On a connu plus décadent ! Lias est comme un cactus, qui s’y frotte s’y pique, il ne faut pas trop le provoquer, n’est-ce pas Goulven élève attentif à qui Lias a refilé la plante verte d’ornement ? Hits Hits Hits, hourrah le concert se tient, la tension musicale commence à devenir sexuelle, on s’y attendait. Ce n’est plus le cactus que Lias touche, il feint le geste, se sent, mais ne bave pas. On se reprend et il nous chante un merveilleux Fringe Runner soutenu par les flûtes d’Alex White et les guitares du frangin Nathan et d’Adam J Harmer . Puis c’est la minute crooner sur le titre Religion For One, avant d’attaquer la fureur sur Feet et ses vagues de slameuses qui surf sur une mer agitée. Un temps à savourer a « cup of Tea » sur le dos, n’est ce pas !
Trêve de rêveries et de placement de copine, il faut atterrir et revenir sur le sable avec Whitest Boy On The Beach et ses « Baby can you tell me how the universe began? ». Un concert qui se termine un peu trop vite à mon goût avec l’envie déjà d’y retourner, version festival là ou Lias se lâche vraiment.

La place est libre et la scène se destine à une soirée en club. La petite tribu de Leeds installe son matériel : trois synthés, deux guitares, une batterie et quatre microphones composent la famille Adult DVD. La jeunesse prend le contrôle d’un tour operator aux hooks accrocheurs et grooves entraînants . C’est un très bon programme pour adulte, diffusé après minuit pour quiconque a un décodeur Casio millésimé. C’est kitsch comme du Bill Murray, c’est chaud comme du Hot Set et pour ceux qui préfèrent ne rien faire, il reste à danser sur Do Nothing. Musicalement c’est frais, c’est pêchu, c’est anglais quoi ! Un set où tout le monde s’amuse et sourit, dommage que dans le public, le frotteur aux bras longs tire sur les fils fluorescents du microphone. “Lâchez les chiens au soleil, mordez-le, il finira par rendre la bouteille de vin qu’il a volé sur scène à Harry Hanson le sympathique leader du groupe.

Chouette, demain c’est dimanche et ils ont prévu un ciel bleu, clin d’œil au prochain rendez-vous en terre Malouine du 13 au 16 août pour la Collection Eté de la Route Du Rock 2025. Il va faire chaud, préparez le Pulp citron – orange, acide ou doux comme un bonbon Very Bad Kids.

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